Suivi des populations de l’Alose feinte du Rhône sur les cours d’eau Gardois

Les services techniques de la Fédération se mobilisent depuis plusieurs années pour suivre l’évolution des populations d’Aloses feintes du Rhône sur les cours d’eau du département. Cette espèce est en effet présente sur le Vidourle, sur le Gardon, sur le Rhône et sur la Cèze, mais ses faibles effectifs méritent d’être étudiés et protégés.

Cette année, le suivi se concentrera sur le Vidourle, à Saint Laurent d’Aigouze.

L’Alose feinte du Rhône (Alosa Fallax rhodanensis) est un poisson migrateur qui fait partie de la famille des clupéidés (groupe des harengs et de la sardine). Elle fréquente les eaux marines littorales pour effectuer sa croissance et migre vers les eaux douces à substrat caillouteux pour sa reproduction. Cette espèce est endémique au bassin méditerranéen, et présente un corps fusiforme, plutôt aplati latéralement. De couleurs argenté sur les flancs, blanc sur le ventre, vert / bleuté sur le dos avec des « reflets métalliques », l’alose feinte du Rhône se caractérise par une tâche noire au-dessus de l’opercule (suivie d’une rangée de taches noires plus petites).

L’aire de répartition de l’alose feinte du Rhône a nettement régressé durant le 20ème siècle. Les obstacles à l’écoulement ont en effet fortement impacté la continuité écologique des cours d’eau. L’espèce est aujourd’hui protégée en France et au niveau européen.

L’alose feinte du Rhône et la Grande alose présentent un réel intérêt pour la pêche de loisir. Il s’agit de poissons appréciés pour leur combativité. Une réglementation assez restrictive (au niveau des modes de pêche et des lieux de pêche autorisés) est mise en place, afin de protéger les populations d’aloses d’une pression de pêche et de prélèvements trop importants. Pour cause de crise sanitaire, les aloses n’ont pu être pêchées à la ligne en 2020, la saison étant normalement ouverte entre le 1er et le 24 avril.

Suivi des populations d’aloses dans le Gard

Différents Plans Migrateurs se sont succédé depuis plus de 20 ans maintenant. Dans ce cadre et depuis 2005, l’Association MRM (Migrateurs Rhône Méditerranée) a initié un programme d’études sur le Vidourle. La maîtrise d’ouvrage de ce suivi est assurée depuis 2017 par la Fédération de pêche du Gard, qui poursuit plusieurs objectifs avec ces études : obtenir des indices quantitatifs de l’intensité de la reproduction et estimer le nombre de géniteurs. Il s’agit également de contribuer à l’évaluation de l’efficacité des dispositifs de franchissement du bas Vidourle.

Les efforts se concentreront en 2020 à Saint Laurent d’Aigouze jusqu’à mi-juin, à l’aval de la passe à poisson (située à 11.8 kilomètres de l’embouchure). La frayère étudiée fait une surface d’environ 2500 m². Il faut savoir qu’en 2017, on estimait que le linéaire accessible pour les aloses sur le Vidourle était d’environ 25 km : la limite amont de colonisation correspond au seuil de Villetelle, qui est infranchissable. Ce seuil de Villetelle devrait faire l’objet d’aménagements en 2020, et ainsi permettre aux poissons migrateurs de coloniser le fleuve en amont de Villetelle.

La reproduction de l’alose feinte du Rhône

La reproduction a lieu de nuit, entre les mois d’avril et juin, lorsque la température de l’eau est au minimum de 16°C. Différents paramètres permettent de constituer une frayère « favorable », comme la hauteur d’eau (entre 0.8 et 2 mètres), la vitesse du courant (de 0,5 à 2,0 m/s), ou une granulométrie spécifique.

Le « bull » est le terme qui caractérise l’acte de reproduction de l’alose : les géniteurs effectuent des mouvements circulaires et frappent la surface de l’eau avec leur nageoire caudale, flanc contre flanc. L’alose est une espèce qui se reproduit plusieurs fois dans sa vie : la plupart des poissons regagnent la mer après s’être reproduits.

Il faut savoir que la présence de silures peut être problématique pour la reproduction des aloses. En 2017 à Saint-Laurent-d’Aigouze, il a ainsi été estimé que plus de 40% des bulls avaient subi des attaques de silures.

Le suivi de terrain

Idéalement, le suivi doit pouvoir s’effectuer sur une soixantaine de nuits de comptages, entre mi-avril et mi-juin. En cette année 2020, le travail de terrain ne peut commencer qu’au mois de mai. La seule méthode fiable consiste en une présence humaine sur site, afin de localiser et dénombrer les « bulls » à l’aide d’une lampe frontale. Le comptage mobilise 2 personnes par soir, entre 23h et 4h30.

Il faut savoir que MRM souhaite associer les pêcheurs, afin qu’ils contribuent à ces remontées d’informations. L’association souhaite en effet mettre en place un « suivi participatif basé sur le retour des captures ». Le renseignement de carnets de captures permet de mieux connaître la répartition de l’alose, avec comme objectif de pouvoir mieux protéger cette espèce. Ces carnets de capture n’ont pas pu être envoyés aux pêcheurs cette année pour cause de crise sanitaire, mais MRM est preneur des informations  relatives aux captures (site, date, durée de pêche, nombre d’aloses…). Si des pêcheurs sont intéressés pour recevoir un carnet l’an prochain, ils peuvent envoyer un mail au contact indiqué sur cette affiche.

Les remontées et reproductions d’aloses varient fortement d’une année sur l’autre, plusieurs facteurs étant déterminant comme la température de l’eau et le débit au niveau de la frayère, les épisodes de crues pouvant aussi avoir des effets négatifs. A titre d’exemple, l’année 2017 est considérée comme une mauvaise année en termes de recensements de « bulls » sur le Vidourle. Le printemps avait été chaud, avec des débits d’eau assez faibles entre avril et juin.

Les observations qui seront réalisées ces prochains jours permettront de déterminer plus précisément comment se portent les populations de géniteurs sur le Vidourle. Espérons que les conditions climatiques et environnementales seront favorables en 2020 pour permettre d’importantes remontées de migrateurs et de nombreuses reproductions. Même si la sécheresse précoce de ce printemps et le peu de pluie tombée depuis quelques mois laissent penser que le débit d’attrait ne serait pas suffisant pour une remontée efficace et une belle reproduction. Nous vous tiendrons informés des résultats de l’étude.