Pistia stratiotes, aussi appelée laitue d’eau, est une plante aquatique flottante originaire d’Amérique du Sud. Connue pour son apparence de petite laitue formant une rosette verte, elle est capable de coloniser rapidement les milieux aquatiques grâce à sa reproduction par stolons.
La laitue d’eau est inscrite sur la liste des plantes exotiques envahissantes (PEE) depuis 2014 par l’EPPO, et sa vente est [normalement] interdite en Europe depuis 2022. Son expansion menace le bon fonctionnement hydraulique des canaux, provoquant l’accumulation de débris et le colmatage de certains ouvrages.

Pistia stratiotes et sa fleur
Une étude pour mieux comprendre l’invasion
Observée pour la première fois dans le Gard en 2005, cette espèce n’était alors présente que de manière ponctuelle. Mais depuis 2016, la douceur de certains hivers lui permette de survivre toute l’année. Aujourd’hui, elle colonise de manière régulière près de 17 kilomètres du contre-canal du Rhône, entre Comps et Aramon.
Depuis deux ans, la Fédération de pêche du Gard mène une étude sur la dynamique de la colonisation de Pistia stratiotes sur le contre-canal. Pour ce faire, des investigations mensuelles sont réalisées, afin de cartographier l’étendu du cours d’eau impacté et de suivre l’effet de cette invasion sur la biodiversité locale.
Cette étude a d’ailleurs fait l’objet d’un article dans le Centre de Ressources des Espèces Exotiques Envahissantes, à lire ici.

Zone d’étude
Un danger pour la biodiversité
Certaines plantes, comme l’iris ou les Jussies, peuvent cohabiter avec la Laitue grâce à leurs parties aériennes. D’autres, comme Vallisnérie (Vallisneria spiralis), ou encore la Grande naïade (Najas marina), des espèces protégées présentent dans le contre-canal, pourraient voir leur habitat menacé par une colonisation totale.
Les inventaires floristiques de printemps ont révélé une faible présence de plantes autochtones, et une prédominance d’espèces exotiques envahissantes comme la jussie et le myriophylle du Brésil. On remarque néanmoins déjà des foyers de Laitue déjà visible, ainsi qu’un tapis conséquent au niveau des ouvrages bloquants. Tapis qui va alors réduire drastiquement l’apport de lumière, ou encore la quantité d’oxygène dissous. Ces conditions, en plus de la densité de laitue, créent alors des habitats inhospitaliers. Seule la périphérie du tapis peut présenter un intérêt, notamment de protection des prédateurs pour les alevins.
Afin d’estimer l’impact de la Laitue sur la qualité biologique du contre canal, deux approches se basant sur la faune ont été utilisées:
- Tout d’abord l’IPR (Indice Poissons Rivière), pour lequel a été réalisé une pêche électrique en bateau par points : à partir de l’abondance et de la composition du peuplement piscicoles, l’IPR compare le peuplement piscicole observé à un peuplement de référence établi pour un environnement supposé peu ou pas impacté par l’activité humaine.
- ainsi que l’IBGA (Indice Biologique Global Adapté), se basant la macrofaune du cours d’eau : à partir d’invertébrés, dits bioindicateurs, leur composition et leur abondance va varier en fonction des niveaux de pollution ou de perturbation du milieu, ce qui permet une interprétation de l’état du cours d’eau.
D’après les premiers résultats, le contre-canal obtient une note de 6/20 à l’IBGA, ce qui le classe dans un état écologique médiocre.

Cortège d’invertébrés dans la Laitue d’eau et dans la Jussie
Une « Excursion technique » dédiée aux Espèces Exotiques Envahissantes du contre-canal du Rhône
Dans le cadre des actions de sensibilisation aux pressions écologiques qui pèsent sur nos milieux aquatiques, une matinée technique a récemment été organisée sur les berges du contre-canal du Rhône. L’objectif de cette rencontre : faire découvrir les Espèces Exotiques Envahissantes (EEE) qui colonisent ce linéaire, mieux comprendre les enjeux liés à leur présence et partager les bonnes pratiques pour limiter leur propagation.
Cette excursion a permis aux participants – pêcheurs, gestionnaires, techniciens et curieux – d’observer sur le terrain plusieurs espèces exotiques envahissantes, de plus en plus fréquentes dans nos cours d’eau. Chacun a pu mesurer l’impact de ces espèces sur la biodiversité locale, ainsi que les causes principales de leur diffusion, souvent des échappées de bassin ou les transferts accidentels entre plans d’eau.
Au-delà de ces constats, la visite fut aussi l’occasion de mettre en lumière les richesses naturelles encore bien présentes sur ce site. Des espèces végétales d’intérêt ont pu être observées, rappelant ainsi l’importance cruciale de la préservation des habitats aquatiques sensibles.
Enfin, cette demi-journée a été l’occasion de rappeler un message essentiel : la lutte contre les espèces invasives passe aussi par des gestes simples et à la portée de tous.
Nettoyer soigneusement son matériel de pêche, désinfecter les bottes, vider et sécher les contenants avant de changer de plan d’eau sont autant de réflexes qui peuvent faire une réelle différence dans la limitation de leur dissémination.