Des intempéries d’une ampleur exceptionnelle se sont abattues sur notre département lors de ce mois de septembre 2020. Un épisode cévenol d’une rare intensité qui a fait subir d’importants dégâts aux habitants et aux rivières de plusieurs bassins versants du Gard.
C’est en particulier une crue centennale qui est venue dévaster les vallées du Gardon et de l’Hérault, créant d’importants impacts sur la morphologie des cours d’eau et sur les populations de poissons présentes.
Impacts sur les faciès d’écoulement du Gardon de Saint-Jean
Les services techniques de la Fédération ont réalisé des pêches électrique d’inventaire sur le Gardon de Saint-Jean le 8 octobre 2020, en étudiant également les faciès d’écoulement du cours d’eau sur 2 stations à Saint-André-de-Valborgne et au Pont de Marty (lieu-dit Pomaret). Il apparaît sans surprise que les proportions de faciès ont été fortement modifiées après la crue du 19 septembre 2020.
Par exemple sur la première station, il y avait moins de zones de profond et plus de zones de courant près de 20 jours après les intempéries. Un comblement en sédiments s’est produit par endroits, il semble aussi qu’il subsiste moins de gros blocs sur les zones de courants dans ce secteur. A noter également que la largeur de la station a augmenté, passant de 4.55 mètres en août 2018 à 8.44 mètres en octobre 2020, ces résultats étant tout de même à nuancer puisque l’étude a été effectuée lorsque la rivière était encore en décrue.
Le faciès d’écoulement a également été modifié au Pont de Marty. Les services techniques ont constaté un colmatage des substrats, des berges très abîmées et instables avec des arbres arrachés et des berges creusées. La crue a emporté sédiments et embâcles.
Impacts sur les populations de poissons
Au niveau des effectifs de poissons sans surprise, les forts débits du Gardon ont entraîné une dévalaison des poissons vers l’aval : les pêches électriques montrent une nette diminution des effectifs, densités et des biomasses comparativement aux années précédentes.
3 espèces ont ainsi été recensées sur la station de Saint-André-de-Valborgne, sur un linéaire de 163 mètres : 1 chevaine, 3 truites fario et 48 vairons. Le nombre d’espèces présentes sur la station a donc diminué depuis les pêches d’inventaires effectuées aux années 2017 (5 espèces) et 2018 (6 espèces). Les barbeaux méridionaux, les blageons et les gougeons ont disparu pour l’instant de ce secteur.
La crue a par ailleurs fait chuter les effectifs de vairons (de 590 individus comptabilisés en 2018 à 48 en 2020) et le nombre de truites (362 en 2017, 61 en 2018 et 3 en 2020).
Sur la station du Pont de Marty, 6 espèces de poissons ont été recensées en 2020 sur une longueur de 154 mètres de rivière : 3 barbeaux méridionaux, 1 blageon, 8 loches franche, 5 goujons, 5 varions et 8 truites fario. En comparant avec une étude de la rivière sur ce secteur effectuée en 2011, on constate une importante chute des effectifs pour les différentes espèces. 538 vairons avaient été comptabilisés en 2011, 45 barbeaux méridionaux et 47 truites. A noter toutefois que des truitelles ont été capturées en 2020, un signe encourageant puisque les truitelles sont souvent plus touchées lors des crues, car moins robustes que leurs congénères plus âgés.
Des suivis réguliers seront dans tous les cas effectués dans les prochaines années sur ces secteurs par les services techniques. Des pêches électriques sont d’ores et déjà également programmées en 2021 sur l’Hérault dans les environs de Valleraugue.
Les actions prévues pour redonner vie à nos rivières
La recolonisation naturelle des secteurs amont du bassin versant du Gardon par la truite fario risque de se heurter à plusieurs contraintes, en particulier à la détérioration des habitats (diminution des caches, comblement des faciès profonds, élargissement de certains secteurs avec des faciès plats…). Les seuils présents sur le Gardon de Saint-Jean provoquent également une rupture de la continuité écologique.
Les affluents permettent parfois aux poissons en cas de crue de se réfugier dans des zones plus propices à leur survie. Mais lors de cette crue de septembre 2020, la majorité des affluents du Gardon ont aussi été touchés (par exemple la Borgne), les populations piscicoles n’ont donc pas pu profiter de ces zones de refuge.
La Fédération a décidé d’agir pour définir les meilleures mesures de gestions piscicoles applicables dans les prochaines années, afin d’aider les différentes espèces de poissons à recoloniser la rivière malgré ces contraintes.
Les AAPPMA de Valleraugue et de Sant-André-de-Valborgne ainsi que la Fédération de pêche du Gard souhaitent protéger les petits cours d’eau, tout en maintenant la possibilité de pêcher sur le réseau principal. La carte suivante a ainsi été proposée aux services de la DDTM du Gard, afin qu’un arrêté spécifique d’interdiction soit publié pour une période de 2 ans.
Concrètement, il pourrait être interdit de pêcher sur le Gardon en amont du no-kill de Saint-André-de-Valborgne ainsi que sur tous les affluents (excepté sur la partie aval de la Borgne).
Sur l’Hérault, c’est à partir de Valleraugue que la pêche serait autorisée, ainsi que sur le Clarou près de sa confluence avec le fleuve. Les pêcheurs seront évidemment tenus informés des discussions menées avec les services de l’Etat et des décisions prises prochainement sur ce point.
Des alevinages en truites seront aussi réalisés sur ces cours d’eau, afin de soutenir les populations de truites fario. Des boîtes Vibert seront ainsi posées sur les ruisseaux en décembre de cette année, avec un quota doublé par rapport aux années précédentes (truites fario de souche Méditerranéenne, en fonction des capacités de production des piscicultures). Puis des truites fario seront lâchées sur le réseau principal par la Fédération aux mois de février et avril (des poissons adultes et des truites de 15 – 18 cm). Les AAPPMA ont également prévu de soutenir les populations de truites dans les prochains mois par des actions spécifiques : la Fédération communiquera régulièrement sur les mesures prises localement pour les pêcheurs.