Depuis près d’un mois la pêche en première catégorie est fermée. Si l’été a débuté presque au mois de mai cette année, il faut reconnaitre que nous n’avons pas eu de périodes sans pluie, aussi longues. Jusqu’au début du mois de juillet, nous avions encore des niveaux « acceptables » malgré la précocité de cette épisode de sécheresse. Mais voila, les traditionnels orages Cévenols de début d’été ne sont pas venus comme les années précédentes. Le résultat est dramatique pour la vie faune aquatique. Au-delà du manque d’eau criant, c’est la température excessive qui va être la plus dévastatrice pour les espèces piscicoles et les insectes de la rivière. Alors oui, nous, amoureux de la nature, ne pouvons pas continuer à pêcher la truite pour des raisons évidentes: d’un point de vue éthique, ces poissons sont en train de lutter pour leur survis, et nous voudrions assouvir notre passion…et puis aller pêcher dans des flaques, pour nous, défenseurs de l’environnement, c’est plutôt antagoniste.
Même si la fermeture de la première catégorie a été actée, ce n’est pas pour cette raison que les truites arriveront à passer la saison estivale et finir leur cycle jusqu’à la reproduction. Les températures extrêmes ont eu une incidence directe sur la quantité de nourriture dans le milieu. Beaucoup d’insectes sont malheureusement morts et l’afflux de vacanciers, concentrés sur les zones de 1ère catégorie, a également un impact très important. Avec ce manque d’eau les lieux de baignades se sont vites retrouvés saturés, avec tout le piétinement que cela génère, nous pouvons facilement imaginer la catastrophe qui se joue au fond de nos rivières. Les pluies du 15 août ont permis de faire descendre un peu la température, mais n’auront malheureusement pas permis aux rivières de retrouver des niveaux corrects. Alors oui il nous reste la seconde catégorie sur le département avec près de 3 000 km de rivière, mais doit-on continuer d’aller pêcher? Chacun se fixe ses limites dans la pratique de sa passion. Ce n’est pas l’impact de la pêche de loisirs qui a une incidence sur les populations piscicoles (aucune étude ne le montre) mais si l’on regarde se qu’il se passe au fond de la rivière, on peut se poser la question. Sur les Gardons près de 100% des affluents ont connu un assec durant l’été 2022.
La préfète du Gard a suivi notre démarche dans la fermeture de la pêche en première catégorie, mais qu’en est ‘il des autres secteurs, des autres espèces. Qui peut penser qu’une espèce a plus de valeur qu’une autre? Lorsque l’on catégorise les espèces à « forte valeur patrimoniale », nous humain, donnons plus de valeur à une truite, un barbeau méridional, qu’à un vulgaire chevesne ou un hotu? Pourtant nous sommes en face d’êtres vivants qui subissent le stress de ces débits faibles et de ces températures folles. La spirale est enclenchée et ce n’est pas dans les années qui arrivent que cela va s’inverser. Nul ne peut ignorer le réchauffement climatique qu’est en train de s’abattre sur notre planète et notre rapport à la nature va de fait évoluer. Dans les années qui arrivent les passionnés que nous sommes seront obligés de changer nos pratiques, de chercher d’autres espèces. Nous avons encore le pouvoir de ralentir ce phénomène en devenant acteur dans nos AAPPMA. Le combat se joue avec nos institutions, non pas contre, mais en travaillant ensemble. C’est en siégeant dans les syndicats de bassin, en allant dans les comités sécheresse pour dire que non il n’y a pas que l’économie qui régit la vie, qu’il y a aussi une alternative possible dans nos pratiques, dans nos productions agricoles, pour qu’ensemble nous préservions notre patrimoine pour les générations à venir.