Espèces exogènes envahissantes

Présentation

Les espèces exotiques envahissantes (EEE) représentent l’une des principales menaces de la biodiversité (au même titre que le réchauffement climatique, les pollutions, la fragmentation des habitats…). Il s’agit d’espèces exotiques (introduite volontairement ou accidentellement dans une aire géographique distincte de son aire d’origine1) qui suite à des conditions qui leur sont favorables se développent de manière importante causant de nombreux impacts écologiques, voire sanitaires et économiques.

 

Causes du succès d’invasion

On estime qu’environ 1 espèce introduite sur 100 pourra se reproduire et se développer et qu’environ 1 espèce introduite sur 1 000 deviendra invasive. Les causes de ces réussites sont multiples. Tout d’abord, les EEE profitent d’un contexte climatique qui leur est favorable, où elles s’adaptent bien, souvent similaire à leur lieu d’origine.

Les plantes s’adaptent continuellement. Ainsi, lors de l’apparition soudaine d’une espèce invasive, cet équilibre est rompu. Les espèces indigènes n’ont généralement pas développé d’armes spécifiques pour lutter contre ce nouvel intrus, laissant tout le loisir à l’EEE d’exploiter les ressources du milieu au détriment des espèces indigènes. Étant nouvelles dans ces milieux, elles n’y ont généralement pas de prédateurs ou de pathogènes (micro-organismes ou parasites infectant la plante) pour réguler leurs populations. De plus, une EEE peut être introduite avec son cortège de parasite, ou ravageur (maladie, nématode, etc.) qui peut également décimer les populations locales, sans défense contre ces nouveaux agresseurs.

L’ensemble de ces facteurs mène à un contexte facilitant l’installation des EEE.

Colonisation des milieux naturels par les plantes invasives

Les origines de ces invasions peuvent être multiples et sont variables selon les espèces. Pour les végétaux, la majorité des invasions sont dues à des plantes ornementales ou cultivées qui se sont échappées (jardin, déversement d’aquarium…). Par exemple, 38% des espèces végétales d’eau douce introduites en France l’ont été pour des raisons ornementales, 29% d’entre elles sont des plantes utilisées en aquariophilie.3 50% des invasions marines en France seraient expliquées par l’aquaculture.3

Certaines espèces se déplacent par le biais des ballasts (réservoirs) de bateau ou encore par le biais des graines s’accrochant aux vêtements. D’autres invasions peuvent se faire de manière plus « naturelle » par un accroissement de l’aire géographique de l’espèce, souvent accéléré par le réchauffement climatique. Par exemple de nombreuses espèces remontent vers les pôles, car les hivers sont plus doux, ne limitant plus leurs développements.

À une échelle plus locale, les cours d’eau (tout particulièrement en période de crue) peuvent entrainer des graines ou des fragments de végétaux en aval ou par débordement sur d’autre plan d’eau, créant de nouvelles zones d’invasions. Les animaux tels que les oiseaux peuvent également transporter involontairement des fragments de végétaux ou des graines s’accrochant à leurs plumes ou leurs pattes.

 

Impacts

Sur l’environnement

Les espèces exotiques envahissantes entrainent une forte diminution de la biodiversité, un déséquilibre des milieux et une réduction des services écosystémiques rendus par les milieux.

Les EEE entrainent des changements dans les conditions physico-chimiques des milieux (pH, température, oxygénation) ou hydrauliques (perturbation, voire blocage de l’écoulement de l’eau).

Les eaux ralenties par les plantes sont moins oxygénées et voient leurs températures augmenter, ce qui peut conduire à une eutrophisation. Cette dernière, d’origine anthropique, est une dégradation des milieux qui consiste en un enrichissement en matière organique, permettant un développement des micro-organismes pouvant consommer la quasi-totalité de l’oxygène du milieu, le rendant anoxique (sans oxygène dissous dans l’eau).

De plus, les EEE entrainent des changements au niveau de l’hydromorphologie du cours d’eau. En effet, les espèces locales maintiennent plus efficacement les berges que les EEE. Les EEE facilitent l’érosion des berges. C’est notamment le cas pour celles à feuilles caduques qui empêchent l’installation des espèces locales.

 

Sur la biodiversité

Les EEE représentent l’une des principales menaces de la biodiversité. Les pressions s’exerçant sur les espèces locales peuvent être :

  • Soit indirecte ; une perturbation des conditions du milieu pourra être moins favorable aux espèces indigènes.

Par exemple, une diminution de la vitesse du courant limitera la colonisation du milieu par les poissons rhéophiles. Les EEE peuvent également apporter des pathogènes.

 

  • Soit directe ; par compétition avec les espèces locales pour les ressources du milieu.

Par exemple les EEE se développent rapidement sur de grands espaces. Cela empêche les espèces indigènes et les graines d’avoir accès à la lumière et de croitre. Cet effet mène bien souvent à une colonisation monospécifique du milieu, c’est-à-dire exclusivement par l’espèce invasive !

De plus, un meilleur accès aux minéraux dans l’eau entraine une meilleure alimentation des EEE en défaveur des espèces locales. On peut aussi citer le phénomène de l’allopathie. Il s’agit de l’émission par un individu de composés toxiques pour les plantes aux alentours. Communément, il s’agit de composé limitant la croissance d’autres espèces.

On observe également un risque de disparition d’espèces locales par un phénomène d’hybridation. En effet, certaines espèces locales peuvent s’hybrider avec des EEE du même genre. Ceci peut aboutir à une disparition de gènes adaptés spécifiquement aux conditions locales.

 

Sur les services écosystémiques

L’apparition d’EEE crée des déséquilibres dans le fonctionnement normal des écosystèmes, tels que des changements dans les dynamiques végétales, impactant également les cycles biologiques des animaux (notamment par une diminution des frayères pour les poissons), etc.

Les services écosystémiques se regroupent sous 4 grandes catégories : les services d’approvisionnement (nourritures, eaux potables, etc.), de régulation (cycle de l’eau, climats, etc.), culturels (sport, contexte paysagé, etc.) et d’auto-entretiens (dépollutions, etc.). Les ripisylves (forêt de bordure de cours d’eau), pour ne citer qu’elles, prodiguent de nombreux services écosystémiques tels que la régulation des eaux (crues, etc.), la régénération naturelle des milieux après une perturbation (pollution, incendie, etc.), l’autoépuration des milieux, la fixation du CO2, le maintien des berges, la diversité d’habitats favorables à la biodiversité, etc.

  • L’installation d’EEE au détriment de cette ripisylve met donc en péril ces services écosystémiques.

Notons tout de même que certaines EEE, dans certaines conditions, présentent d’importantes capacités d’accumulation des éléments traces métalliques et métalloïdes (métaux lourds), et d’autres composés toxiques. Cette dépollution des eaux représente ainsi une voie de valorisation des EEE (comme la laitue d’eau Pistia stratiotes et la jussie Ludwigia peploides).

 

Impact sur la santé

Certaines espèces présentent un danger direct pour la santé humaine. Par exemple, dans le Gard nous pouvons identifier :

  • La berce du Caucase (Heracleum mantegazzium), hautement toxique, produisant une phototoxine urticante dans sa sève, rendant la peau extrêmement photosensible. Elle cause d’importantes blessures similaires à de grandes brûlures. À noter que la sève est indolore, mais peut produire des dermatites jusqu’à 48h après exposition. Les plaies peuvent rester photosensibles pendant des mois voire des années et laissent des taches brunes ou blanches sur la peau.
  • L’ambroisie (ambrosia psilostachya) et le Houblon du Japon (Humulopsis scadens) possédant des pollens hautement allergènes pouvant entrainer de fortes crises d’asthme.
  • Le raisin d’Amérique (Phytolacca americana) est toxique en cas d’ingestion des fruits (possible toxicité également en cas de contact avec les feuilles et la sève)

 

Impact socio-économique

Le développement des végétaux EEE impacte les activités de pêche en limitant les zones de pêches, rendant la mise à l’eau de barque difficile et accrochant les lignes. De plus, les EEE réduisent fortement les stocks de poissons, leurs habitats et leurs ressources alimentaires. Il y a également des impacts sur les sports d’eau vive en bloquant l’accès à certaines aux cours d’eau.

Les EEE entrainent des coûts financiers importants. En France ces coûts s’élèvent à 19 millions d’euros par an. À ces dépenses s’ajoutent celles des actions de lutte contre ces espèces, qui atteint également 19 millions d’euros par an en France (entre 2009 et 2013). Soit un total de 38 millions d’euros par an en France.4

L’évaluation des coûts annuels des dommages et des interventions de gestion des EEE à l’échelle européenne en 2008 dépassait les 12 milliards d’euros. 3

 

Méthode de luttes

Il existe de nombreuses méthodes de lutte contre les EEE dont les efficacités sont très variables selon les espèces. Les principales utilisées sont les méthodes mécaniques, physiques, chimiques et biologiques.

Il est important de préciser que plus une invasion est identifiée tôt, plus elle est traitée rapidement et plus son traitement sera efficace. En cas de colonisation importante, les chances de réussite d’éradication sont minces et les coûts financiers associés sont élevés.

La lutte mécanique consiste généralement en un arrachage ou broyage de l’espèce végétale. Cela peut être réalisé à la main ou avec des tractopelles par exemple selon l’intensité du système racinaire.

La plupart des espèces végétales invasives se multiplient par bouturage (ou contiennent des graines très facilement dispensables). La lutte mécanique peut se traduire une multiplication des sites de colonisation de l’espèce. Ces méthodes nécessitent donc la mise en place de précautions importantes afin de ne pas aggraver la situation.

Des méthodes de lutte physique,telles que le brulage peut être employé.

La lutte biologique est l’utilisation d’organismes vivants afin de limiter l’expansion des EEE. En apportant des parasites, prédateurs et pathogènes spécifiques à l’EEE. À l’image de la lutte chimique, l’apport de pathogènes ou prédateurs spécifiques de la plante, constitue un risque d’une nouvelle invasion biologique, ou d’un changement de cible de l’agent biologique vers les espèces autochtones. Ce genre de mesure doit être bien réfléchi avant sa mise en place.

Un revégétalisation des berges peut également avoir un impact sur les EEE avec l’implantation d’espèces végétales ligneuses.

Souvent plusieurs de ces méthodes sont utilisées sur un même site, par exemple un arrachage (lutte mécanique) et une revégétalisation (lutte biologique).

 

Fiche de présentation des espèces exotiques envahissantes identifiées dans le Gard

Renoué du Japon (Reynoutria japonica)
& Renouées de Sakhaline (Reynoutria sachalinensis)
& hybride : la Renoué de bohème (Reynoutria X bohémia)

Fiche-espèce-Renoué-du-Japon-Reynoutria-japonica-Renouées-de-Sakhaline-Reynoutria-sachalinensis-hybride-la-Renoué-de-bohème-Reynoutria-X-bohémia.pdf

 

                                                                                                         Jussie rampante (Ludwigia peploides)
& Jussie à Grandes fleurs (Ludwigia grandiflora)

Fiche-espèce-Jussie-rampante-Ludwigia-peploides-et-Jussie-à-Grandes-fleurs-Ludwigia-grandiflora.pdf

 

 

Laitue d’eau (Pistia stratiotes)

Fiche-espèce-Jussie-rampante-Ludwigia-peploides-et-Jussie-à-Grandes-fleurs-Ludwigia-grandiflora-1.pdf

 

Raisin d’Amérique (Phytolacca americana)

Fiche-espèce-Raisin-d’Amérique-Phytolacca-americana.pdf

 

Myriophylle du Brésil (Myrriophyllum aquaticum)

Fiche-espèce-Myriophylle-du-Brésil-Myrriophyllum-aquaticum.pdf

 

Houblon Japonais (Humulus japonicus ou Humulopsis scandens)

Fiche-espèce-Houblon-Japonais-Humulus-japonicus-ou-Humulopsis-scandens.pdf

 

Grand lagarosiphon ou Élodée d’Afrique (Lagarosiphon major)

Fiche-espèce-Grand-lagarosiphon-ou-Élodée-d’Afrique-Lagarosiphon-major.pdf

 

Faux indigo ou Amorpha (Amorpha fructicosa)

Fiche-espèce-Faux-indigo-ou-Amorpha-Amorpha-fructicosa.pdf

 

                                                                    Élodée Nuttall (Elodea nuttalli) & Élodée du Canada (Elodea canadensis)

Fiche-espèce-Élodée-Nuttall-Elodea-nuttalli-Élodée-du-Canada-Elodea-canadensis.pdf

 

Arbre à papillons ou Buddléia (Buddleja davidii)

Fiche-espèce-Arbre-à-papillons-ou-Buddléia-Buddleja-davidii.pdf

 

Égérie dense (Egeria dense)

Fiche-espèce-Égérie-dense-Egeria-dense.pdf

 

Concombre anguleux (Sicyos angulatus)

Fiche-espèce-Concombre-anguleux-Sicyos-angulatus.pdf

 

                                                                                               Berce du Caucase (Heracleum mantegazzianum)

Fiche-espèce-Berce-du-Caucase-Heracleum-mantegazzianum.pdf